Episode 2
– Bonjour madame !
– Bon, vous allez peut-être m’appeler autrement que madame, non ?
– Mais vous vous appelez comment ? Vous n’avez fait aucune com sur ce colloque fictif… Alors bien sûr on ne sait rien de vous.
– Je préfère ne pas mettre le prénom de celle qui écrit. Mon prénom, quoi. Car je veux m’amuser avec ce personnage de prof-maître yogi-spirituel… je veux m’amuser, vous comprenez ? Juliette ! Vous m’appellerez Juliette, ça vous va ? On dirait que j’avais un jogging adidas rose et que j’avais des cheveux longs et blonds… ils seraient bouclés, je serais un peu maquillée, non j’aurais carrément du rouge à lèvre fuchsia !
– Juliette, pouvons-nous revenir à nous, à la méditation, s’il vous plaît ?
– oui, bien sûr, pardon, je t’écoute Marie.
– Je viens de faire comme vous m’avez dit…
– On se tutoie, hein ?!
– Comme tu nous as dit : 10 minutes. « Essayer de voir tout ce que j’ai dedans et accueillir ». J’ai bien compris, hein ? Mais ça m’effraie complètement quand je vois mes angoisses, c’est insupportable, ça m’en rajoute ! J’ai du mal à respirer depuis tout à l’heure… voilà, désolée c’est pas très positif tout ça…
– Merci Marie pour ce témoignage. C’est quelque chose de très fréquent donc c’est important d’en parler. Pour répondre à ta question, je dois commencer par parler de nos fonctionnements. Bien sûr, nous avons des cultures et des personnalités différentes mais nos fonctionnements se ressemblent en de nombreux points.
Nous vivons tous des mouvements intérieurs qui sont les suivants : les sensations, les émotions et les pensées. Il n’y a rien de mal à ressentir cela, bien sûr, c’est naturel et il n’est sûrement pas question d’arrêter en méditation le mouvement de la vie, au contraire ! C’est essentiel de comprendre cela car pour beaucoup, la méditation se résume à tenter d’arrêter une forme de vie. Pas du tout ! La méditation, c’est décider d’arrêter de faire, se tourner vers l’intérieur et non vers l’extérieur… mais en pratiquant, on se rend compte que tout est lié de l’intérieur… ça, nous y reviendrons plus tard !
Revenons à notre trio « émotions, sensations, pensées ». Observez qu’elles peuvent se vivre séparément mais la plupart du temps, elles se mélangent. Une pensée entraîne une émotion qui entraîne une sensation ou l’inverse, d’ailleurs !
Ces mouvements naturels intérieurs sont comme des vagues qui vont et qui viennent. Il n’y a jamais de vide. Ou très peu.
Toutes ces vagues s’inscrivent dans notre mémoire consciente ou inconsciente. Donc, bien sûr malgré nous, une odeur nous rappelle une émotion, ou une émotion nous rappelle une situation (pensée…). Il y a des sortes de ponts qui se créent entre notre réalité présente et notre passé ou même notre projection pour l’avenir. Nous commençons alors à nous « raconter des histoires », à « créer des scénarios ».
Exemple : je médite en temps de pandémie de coronavirus, je me sens extrêmement angoissée, je vois cette peur, je la ressens MAIS je la refuse car je suis venu pour être bien OU ça me rappelle trop de mauvais souvenirs alors je crée la peur de la peur car JE VEUX ETRE BIEN ! Et je crée une autre forme de réalité : la peur de la peur. Qui devient la peur de la peur de la peur. Une angoisse diffuse qui ne repose sur rien de précis.
C’est clair ou pas du tout ?
– Pardon Juliette, mais je me fiche un peu des explications, ce qui m’intéresse à moi c’est de savoir comment sortir de cet état très inconfortable !
– Oh ! comme tu as raison ! Mais, oh comme il va falloir que tu comprennes un peu quand même car c’est un sacré point d’appui pour la pratique !
– Je n’ai jamais médité et je veux une solution rapide… j’ai l’impression qu’il y a urgence !
– Veux-tu progresser ?
– Oui, vite !
– Veux-tu progresser ? Vite ou pas vite, ça, ça ne dépend pas de toi !
– Bien sûr, sinon je ne serais pas là.
– Alors, fais ce que tu as à faire tous les jours. Ni plus, ni moins. Et lâche le reste !
Je vais vous raconter une petite anecdote que je vais complètement déformer car je transforme toujours les histoires qu’on me raconte :
C’est l’histoire d’un gars qui va voir un maître spirituel (un sage), pour récolter quelques conseils sur ce qu’il a à faire pour moins souffrir dans son quotidien.
– Tous les jours, tu médites 40 minutes, tu te concentres sur ta respiration, juste cela. Tu fais ça tous les jours ! lui dit le maître.
– Oui mais je suis très occupé, j’ai des enfants, un métier très prenant, je suis complètement débordé ! 40 minutes, c’est vraiment beaucoup pour moi…
– Je vois… je comprends… alors faites le double !
– Je ne vois pas le rapport entre ma situation et cette anecdote !
– J’aime bien cette histoire…